Algérie-France, la co-dépendence parfois toxique. Dans les années 60, 70 et même 80, le couple franco-algérien travaillait plutôt bien ensemble. Les souvenirs de la Glorieuse Révolution Algérienne de Novembre 1954 étaient présents dans les esprits des Algériens, mais aussi les souvenirs de la coopération professionnelle avec les français chrétiens et juifs et athés. Donc, entre 1962 et la fin des années 80, le couple travaillait plutôt en harmonie.
C'est dans les années 90 que le couple devient toxique. En 1985 la France impose un visa aux ressortissants Algériens (parce que l'Algérie a supprimé son autorisation de sortie du territoire). Puis la procédure de visas se complique. Or, les Algériens ont besoin de se rendre en France, parfois pour des soins, pour des études, pour faire du commerce, pour des prospéctives commerciales, ou encore pour rendre visite à de la famille, parfois en urgence (décès, maladie d'un membre de la famille, urgence familiale).
Or, la demande de visa pour la France est une procédure qui devient, au fil des ans, de plus en plus bureaucratique. Pour qu'un Algérien obtienne un visa pour la France, il lui faut justifier de ses revenus, avoir un compte en banque bien rempli avec des rentrées d'argent régulières, il faut un cértificat d'hébergement, des justificatifs de domicile et de possessions de biens en Algérie, bref, une procédure compliquée pour des Algériens qui doivent parfois se rendre en France de façon urgente ou pour des motifs familiaux indispensables. Ou parfois pour des motifs professionnels indispensables (achat de biens ou de machines pour l'entreprise).
Pour combler ce problème de visas, la Turquie est venue au secours de l'Algérie (un petit peu l'Italie aussi). La Turquie, et à moindre mesure l'Italie, permettent les visites médicales, l'achat de machines ou encore la prospection commerciale que la France empêche. Donc, les Algériens se rendent en Tuquie ou en Italie pour certains motifs urgents, avec la barrière de la langue et la barrière culturelle bien sûr.
Et c'est ce qui fâche les algériens. Colonisés pendant 132 ans, francophones, familiers avec le système de santé français et avec les rouages économiques français (grâce aux chaînes de télévision françaises) et surtout ayant de nombreux membres de la famille en France, les algériens sont obligés d'esquiver la France pour des raisons administratives quand ils doivent se rendre en France.
La France répond que les Algériens usent et abusent de l'hospitalité des Français. Islamisme, terrorisme, antisémitisme, non-respect des délais de séjour accordés, criminalité, crime organisé, banditisme, abandon de famille, leurs enfants sont abandonnés à leur sort et sont parfois obligés de dealer de la drogue pour s'en sortir. Bref, la constat est accablant.
L'Algérie, dans une guerre d'honneur et de réputation, n'aime pas le paragraphe précédent. Donc au lieu de travailler ensemble à essayer de résoudre les problèmes, l'Algérie ressort, depuis les années 1990, le dossier du colonialisme et des crimes coloniaux.
C'est à dire qu'au lieu d'essayer de trouver des solutions aux problèmes graves parfois causés par des ressortissants Algériens en France, le gouvernement algérien (faute d'idées sur les solutions qui puissent être apportées) accuse la France de crimes coloniaux, et ces accusations de crimes coloniaux continueront tant qu'il y aura des Algériens qui fouteront la merde en France.
Pour ce qui est des crimes coloniaux, l'Algérie refuse de travailler sur le fond, sur l'histoire. Les crimes coloniaux sont une sorte de religion, de livre sacré, ce livre sacré dans lequel les formules sont vagues, et duquel il ne faut surtout pas débattre. Les crimes coloniaux, faits de l'histoire, ne peuvent être débattus. Et on ne parle pas de négationisme, on parle simplement de débattre l'intensité de telle ou telle bataille, ou encore le contexte plus global dans lequel s'est déroulée la guerre.
Quant à l'existence de l'Algérie avant 1830 si chère aux Algériens, Don Quichotte nous apprend quelque chose. Pour ceux qui n'ont pas lu le chef d'oeuvre de Cervantès (et qui sont très nombreux) Don Quichotte finit par se faire arrêter par des guerriers maures et est déporté à Alger.
Ce que Don Quichotte nous apprend c'est que la région Afrique du Nord-Ouest s'appellait la Maurétanie, donc c'est la nom de la région Maroc-Algérie-Mauritanie. La partie Est de la Maurétanie était sous emprise Ottomane. Certains grandes villes comme Alger ou Tétouan avaient des vice-rois plus ou moins nommés par Constantinople. Le reste de la Maurétanie étaient des chefferies, des tribus avec un chef de tribu, plus ou moins autonomes.
D'ailleurs, à l'époque, on ne disait pas que les Maures parlaient “arabe” mais “maure”. Ce n'est qu'à la colonisation française, peut-être parce que “Maure” est homonyme avec “mort” qu'on a commencé à dire que les Algériens parlaient “arabe” et qu'on a commencé à appller les “maures” des “arabes”.
Mais reste que les Algériens d'aujourd'hui se sentent un peu humiliés de ne pas pouvoir circuler librement en France, parce que d'une ils connaissent bien la France pour certains, de deux ils ont parfois des besoins urgents de se rendre en France, de trois ils sentent que les Français les accusent d'être des criminels même quand ils ne le sont pas.
Reste que comme pour les Turcs avec la libre circulation dans l'Union Européenne, il faudra peut-être attendre que l'Algérie aie des indicateurs économiques et sociaux un peu plus optimistes avant d'envisager une libre circulation des Algériens en France.
En même temps il ne faudrait pas que les Algériens accusent la France de saboter l'Algérie économiquement, comme on entend souvent dire dans les cafés. La recette du développement économique, je vous l'ai donnée, et on peut travailler ensemble dessus. Mrahba bikoum. Ovi+Africa Ovi+Europe Ovi_magazine Ovi |